La maison des fous

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5_EIN-21-Sones-400.jpgKeith Sones

22 mars 2019

Lorsque les gens ont commencé à s’organiser en groupes capables de vivre et de cultiver ensemble, quelqu’un ou peut-être un groupe quelque part a pris des décisions avec lesquelles je suis vraiment en désaccord. C’était probablement un comité. L’individu ou le groupe s’est assis et a décidé que la partie logique du cerveau humain nuisait, il a donc élaboré un plan brillant. D’une manière ou d’une autre, et j’essaie encore de comprendre comment, nous avons décidé d’installer un interrupteur dans nos têtes. Un peu comme un interrupteur de lumière.

L’idée ressemblerait à ce qui suit. Parfois, nous agirions de manière tout à fait rationnelle et utiliserions une analyse logique pour régler le problème. Quand nous avons commencé à bâtir des maisons avec des toits faits de matériaux lourds comme la pierre et le bois, un effondrement des structures pendant que vous et votre famille dormez n’était probablement pas une bonne idée et nos ancêtres ont donc trouvé un moyen d’éviter une mort certaine en renforçant les murs et en inventant des chevrons qui vous permettent de dormir profondément (et en vie) nuit après nuit. À d’autres occasions, toutefois, l’interrupteur basculerait de l’autre côté et nous deviendrions collectivement stupides. Stupide du genre : « Hé, saoulons-nous et allons jouer dans la circulation sur l’autoroute ». Pour un observateur non endoctriné, cela aurait l’air fou et dangereux. Mais pour ceux d’entre nous qui feraient partie du système, tout semblerait parfait.

Il y a quelques semaines, mes voyages d’affaires m’ont fait traverser le pays, de Vancouver à St-Jean située dans notre province la plus à l’est. La première journée du voyage, bien que longue et fatigante, s’est déroulée sans encombre et je suis arrivé sain et sauf dans la capitale de Terre-Neuve-et-Labrador. Les réunions se sont bien déroulées et j’étais heureux de m’envoler vers ma prochaine destination, Fredericton et St-Jean au Nouveau-Brunswick. Ou du moins, c’est ce qui était prévu.

Pour être juste, l’hiver est une période difficile pour voyager au Canada. La glace, la neige et le vent contribuent souvent à rendre le transport routier et aérien quasi impossible. Ça me va. Conduire un avion dans une tempête de neige n’est probablement pas la meilleure idée et pourrait même être en tête de liste du classement annuel des Darwin Awards (https://darwinawards.com/). Les retards dus au mauvais temps font partie de la vie. Alors, imaginez ma surprise lorsque la notification de vol m’a avisé que la compagnie aérienne ne pouvait pas trouver d’équipage. Quoi? Je les ai appelés pour apprendre qu’ils ne savaient pas où se trouvait l’équipage. Non pas qu’ils aient été retardés eux-mêmes, mais qu’ils manquaient à l’appel.

Je n’en étais pas à mon premier rodéo, alors je connaissais l’exercice. Chambre d’hôtel près de l’aéroport, recommencer tôt le lendemain, arriver en retard, espérer qu’il reste encore assez de temps pour les réunions, excuser mon retard, rencontrer, terminer les rencontres et recommencer. J’ai pu me rendre à Halifax ce soir-là et j’étais optimiste pour le lendemain. J’avais une réservation sur un vol à 8 heures du matin, j’étais prêt à partir à sept heures.

Ensuite, l’annonce d’un retard. On m’a informé que c’était un problème mécanique facile à régler et que tout devrait être prêt pour l’embarquement dans environ 15 minutes. D’accord, pas de problème. Je me suis assis et j’ai attendu pour l’appel qui fut plutôt pour nous annoncer que notre séjour à l’aéroport serait prolongé de 30 minutes supplémentaires. En jetant un coup d’œil à ma montre, j’ai tout simplement pensé à un plan B, qui comportait un vol vers une autre destination suivi de la location d’une voiture. « Pas de problème » me suis-je dit. Je peux encore y arriver. Je me sentais un peu plus anxieux, mais j’ai tenu une heure avec cette possibilité en tête.

Ma réaction à l’annonce du troisième délai de 15 minutes supplémentaires, m’a pris au dépourvu. Je me suis senti instantanément en colère et de manière assez intense. « Attends », me disait l’ange sur mon épaule. « C’est juste quelques minutes de plus. Détends-toi ». À l’opposé, celui vêtu de rouge et tenant une fourche sur l’autre épaule hurlait : « n’écoute pas cette merde. Ces gens-là se foutent de ta gueule. Pourquoi ne mettent-ils pas cette histoire au clair une fois pour toutes ? Qu’est-il arrivé à « une réparation rapide, effectuée en quelques minutes »? Ta journée et tes trois réunions importantes s’en vont tout droit en enfer! ».

Je lui ai donné raison, mais je me sentais toujours en déséquilibre. J’ai parcouru des centaines de milliers de kilomètres et les compagnies aériennes de quatre continents m’ont retardé ou ont annulé mes vols. Voyons Keith, quel est le problème? Tu peux toujours replanifier.

Heureusement et de manière très ironique, j’étais finalement heureux d’avoir eu quelques heures de plus pour réfléchir à la raison pour laquelle j’étais si contrarié. L’ironie découle du fait que j’ai subi trois autres retards et l’annulation ultime du vol, pour un total de huit heures dans le magnifique aéroport international de Stanfield, c’est pourquoi j’ai eu le temps de réfléchir. Alors j’ai réfléchi, médité, envisagé, ruminé et analysé pourquoi j’étais si contrarié. Ça ne me ressemble pas d’être aussi agacé par les retards des compagnies aériennes. Il devait y avoir quelque chose d’autre qui s’était logé dans mon esprit et qui avait créé cette grave anxiété.

Je l’ai découvert à la sixième heure.

Ce n’était pas l’avion brisé, les communications lamentables de la compagnie aérienne, les réunions manquées ou même le sentiment que j’avais perdu une journée complète. J’étais aux prises avec quelque chose de beaucoup plus grand comportant d’importantes répercussions.

C’était l’idée que cette expérience frustrante, misérable, longue et coûteuse était jugée acceptable. Pas seulement par la compagnie aérienne, mais par la société en général. Et je suis à peu près certain d’avoir manqué la réunion où « ils » ont décidé que c’était bien.

Pensez-y. Si vous appelez un taxi pour vous rendre à un événement important, disons la cérémonie de remise des diplômes de votre fille ou une réunion d’affaires cruciale et que plusieurs retards vous ont déjà été annoncés avant qu’ils ne vous disent qu’ils ne viendraient pas du tout, vous seriez en furie. Très peu de gens accepteraient votre excuse « la compagnie de taxi s’est fourvoyée », et vous seriez jugé pour votre manque de planification. Mais dites à votre auditoire que la compagnie aérienne a retardé ou annulé votre vol et il est probable que vous obtiendrez une réponse du genre « oh non, ça m’est arrivé la semaine dernière ». D’une certaine manière, cette situation a été normalisée par une société polie.

Et c’est inacceptable.

Aux heures sept et huit avant le vol à destination de Toronto (maintenant), j’ai fait face à plusieurs autres scénarios où le ridicule est devenu la norme. Une fois que j’ai commencé à affronter des situations quotidiennes avec le filtre « Quand sommes-nous tous devenus fous? », les exemples ont afflué. En voici quelques-uns qui font réfléchir…

La politique des deux côtés du 49e parallèle et, en fait, dans le monde entier comprend un récit spécifique continu qui est instantanément familier à tous ceux qui s’intéressent aux nouvelles et même à plusieurs qui ne s’y intéressent pas. Des politiciens de tous les partis ont pris plusieurs engagements au cours de la période précédant les élections, promettant d’équilibrer le budget, de protéger l’environnement, de nourrir ceux qui ont faim et d’éduquer les enfants du pays. Une fois installés, les nouveaux venus sont confrontés à la réalité de gouverner (ce qui est difficile à la base) et reçoivent des réponses prévisibles. Nous n’avions aucune idée que les livres étaient en si mauvais état. Les choses coûtent plus cher que nous le pensions. Il s’avère que la promesse que j’ai faite est impopulaire auprès de plus de gens que je ne le croyais, le projet est donc abandonné.

Imaginez que vous dirigiez votre entreprise comme ça. Ou vos relations. Bonjour, membres du conseil. La moitié de ce que j’avais promis au président-directeur général lors de mon entrevue d’embauche était une pure fiction. Cela n’arrivera pas. Salut chérie, désolé mais je plaisantais lorsque je t’ai dit que je voulais des enfants, vivre en ville et que j’aimais ta mère. Il y a de fortes chances que ni les membres de l’exécutif ni le nouveau mari ne restent jusqu’à la fin de la conversation. Mais quand il s’agit de ceux qui nous gouvernent, nous leur donnons un appui collectif.

Il y a quelques années, mon épouse a été victime d’une agression par des employés d’une municipalité. Une enquête a été ouverte et personne n’a contesté les faits, mais quand est venu le temps d’exiger des comptes aux auteurs du méfait, ce fut un mur d’avocats, de documents de non-divulgation et de demandes d’informations bloquées. Quelques personnes, payées par les contribuables, craignaient de faire mauvaise figure et étaient prêtes à dépenser des milliers de dollars pour s’assurer que les détails ne soient jamais rendus publics. Raisonnable? Bien sûr que non. Mais socialement acceptable? Apparemment.

Dans le cadre de mes fonctions, je constate que de nombreuses organisations qui détiennent et exploitent des systèmes d’alimentation électrique luttent pour diverses raisons légitimes. Des infrastructures vieillissantes, la pression financière que ressentent les contribuables, un public qui s’objecte au paysage qui vient avec de nouvelles lignes de transport, de nouvelles technologies, des opportunités ou des rendements d’investissement plus faibles ou inférieurs aux attentes plus élevées de la clientèle, tout cela mène à des décisions difficiles chaque jour de la semaine. La réalité est que différentes périodes et de nouveaux problèmes soulèvent d’autres discussions entre les joueurs de l’industrie. Quoi de neuf? Comment économiser de l’argent sans diminuer la sécurité et la fiabilité? Je suis fier de dire que bon nombre de mes collègues du secteur des services publics et des entrepreneurs s’engagent dans ces nouvelles discussions visant à améliorer l’industrie de l’électricité, tout en maintenant et en améliorant l’expérience client.

Mon professeur de physique en 11e année m’a dit que je n’aurais besoin que de deux choses pour réussir. Numéro un : F = MA. L’équation de force de base, comme toutes les formules, est importante pour trouver la bonne réponse numérique. Numéro deux : tu ne peux pas pousser sur une corde. Lorsqu’on a le sentiment que quelque chose ne tourne pas rond ou que ça sent mauvais, c’est probablement le cas et le temps le prouvera. Il existe certains pans de notre société où nous avons été amenés à croire que la folie est normale. Soyez à l’affut. Vous êtes peut-être confrontés à l’une de ces situations. Et il est temps de changer.

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